À la
Belle de Mai, des enfants rom guidés sur le chemin de l'école
Dans le cadre du festival des
cultures tsiganes Latcho Divano, une exposition a été présentée sur le thème du
droit à l'éducation des enfants rom. A cette occasion, Marsactu est allé voir
comment se déroulait leur scolarisation à Marseille. L'école Révolution de la
Belle de Mai nous a ouvert ses portes.
E.C
Par la fenêtre ouverte, le brouhaha
qui domine dans la salle de classe des CP-CE1 s'échappe à contre-courant du
mince filet d'air frais. A l'école élémentaire Révolution, dans le quartier de
la Belle de Mai, plusieurs enfants rom sont scolarisés, en conformité avec la
loi qui oblige les écoles publiques à accepter toutes les demandes
d'inscription.
La classe de l'instituteur Laurent
Baldovino accueille quatre jeunes enfants, âgés entre 6 et 7 ans. Pour ce cours
un peu particulier où les enfants doivent écrire une phrase sur leur semaine
passée avec des poneys, Santiago, 9 ans, le grand-frère de Maria-Larissa, est
venu prêter main forte aux plus jeunes. Tandis qu'il s'applique en appuyant sur
son stylo, il raconte ses débuts difficiles, alors qu'il arrivait de Roumanie.
Certains élèves lui jetaient à la figure qu'il fouillait dans les poubelles. "Au
début je ne comprenais rien, on me disait des choses méchantes. Je voulais
changer d'école." À ses côtés, Maria-Larissa prétend n'aimer "que
son maître".
Le petit Renold, lui, vient
d'Albanie. À seulement sept ans, il se souvient aussi de son arrivée, des
débuts difficiles en France et de son intégration chaotique auprès des autres
élèves, qu'il raconte avec ses mots d'enfant, désormais entouré de plusieurs
camarades de jeu. "Parfois je veux changer d'école", lâche-t-il avec tout de même, un
petit sourire en coin qui vient dédramatiser son propos. "Au
sein de l'école, les propos racistes restent rares, éclaire Laurent Baldovino. Les enfants sont
plutôt très bien intégrés. Mais il est arrivé qu'une écolière plus grande,
Pamela, vienne nous voir en pleurs : certains lui avaient dit qu'elle fouillait
les poubelles et que c'était une Roumaine, comme si c'était une insulte".
Les situations diffèrent d'un
enfant à l'autre. Le dénuement dans lesquels sont plongés certains constitue
une entrave de plus à la scolarisation. Car si Renold bénéficie avec ses
parents d'un logement en dur, Santiago et Maria-Larissa vivent dans une caravane
à cinq, avec leurs parents et un petit frère. Ioana, 6 ans, habite dans le
bidonville de Plombières. Cette petite fille espiègle montre fièrement ses
longs cheveux bruns qui ont poussé depuis son arrivée où "ils
étaient courts comme un garçon". L'instituteur explique que cette enfant vit dans une
situation d'extrême précarité. "La maman qui ne parle pas français, vient
toujours l'amener le matin et la rechercher. Un lien s'est créé avec elle" ajoute-t-il.
"Pas d'école, pas de tête"
A la sortie de l'école, plusieurs
parents rom sont présents. Le père de Santiago et Maria-Larissa salue
l'instituteur. "Je les accompagne tous les jours explique-t-il. Ils ont le
droit d'aller à l'école comme tous les enfants, et c'est important qu'ils
apprennent à lire et à écrire pour avoir un avenir... S'il n'y a pas d'école,
il n'y a pas de tête". "Un jour, en 2012, reprend Laurent Baldovino,il y avait des
menaces d'expulsion. Malgré cela, les enfants ont été envoyés à l'école par
leurs parents, après un contrôle de police. Ils sont arrivés sans leur cartable
et sans affaires, apeurés, mais ils sont venus".
Comme d'autres écoliers allophones
(dont la langue maternelle n'est pas le français), les enfants roms participent
en parallèle à une prise en charge spéciale par Anne Delmotte, enseignante en
CLIN (classe d'initiation).
A raison d'environ une heure et demie par jour, elle encadre des enfants ne
parlant pas ou peu le français, et les Roms constituent une part importante de
ses effectifs. "Au niveau assiduité, cela dépend des
familles, analyse
la prof. Il y a une dynamique assez fragile induite par les
conditions de vie précaires. Lorsqu'un enfant vient, il entraîne souvent les
autres enfants du même campement. Certains sont livrés à eux-même et viennent
seulement quand ils ont envie, parce qu'ils se sentent trop en décalage... Pour
d'autres, on sait que s'ils ne viennent pas, c'est qu'il y a vraiment un
problème. C'est pour cela que nous travaillons en étroite relation avec les
associations. L'école doit être un moment serein, où les enfants échappent en
partie à leurs soucis."
L'ancienne ministre déléguée
chargée de la réussite scolaire George Pau-Langevin avait envoyé aux recteurs
d'académie trois circulaires en septembre 2012. Il s'agissait de réaffirmer le
principe d'égalité républicaine et cette obligation de scolarisation pour tous,
quelle que soit la nationalité des enfants. L'école Révolution porte bien son
nom, lorsque le respect de la loi semble parfois relever de la gageure.
Mars educ
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