mardi 13 mai 2014

A LA BELLE DE MAI, LES ECOLES VONT CRAQUER

À la Belle de Mai, les écoles vont craquer

La mobilisation de l'école National couve encore et voilà que les parents d'élèves de l'école Busserade ont bloqué ce mardi l'accès à l'école qui accueille leurs enfants. Tous demandent l'ouverture urgente de nouvelles classes dans le 3e arrondissement. Or, les projets de construction de la Ville s'échelonnent entre 2015 et 2018.

Esther Griffe
Par Benoît Gilles, le 13 mai 2014Après la cigarettière, la mère d'élève en colère est en passe de devenir la nouvelle image associée au quartier de la Belle de Mai. Chaque année, en prévision de la rentrée, les parents d'élèves se mobilisent pour pousser la Ville à trouver une solution durable à la saturation des écoles du secteur. Lundi dernier, ceux de l'école National, située sur le boulevard du même nom, obtenaient de la Ville un rendez-vous et la promesse que la construction d'une école provisoire avec deux fois dix classes serait proposé lors du conseil municipal du 23 juin pour la rentrée 2015.
Ce mardi, à quelques mètres à peine, ce sont les parents de l'école Busserade-Masséna qui ont sorti les draps peints et bloqué durant quelques heures l'accès à leur établissement. "Nos enfants ne sont pas des sardines", proclame la banderole tendue devant l'école. Au bout du balai qui s'agite, Barbara résume leurs revendications : "Cette école en préfabriqué à été construite en 2010 pour faire face aux besoins du quartier. A l'époque, elle comptait 8 classes. Elle en a 11 aujourd'hui. A la rentrée 2013, ils ont même coupé en deux le gymnase pour en faire une de plus. Là, les effectifs ont encore augmenté et ils nous annoncent la construction d'une nouvelle classe. Là, on dit stop".

"Toutes les écoles sont saturées"

Emboîtant le pas aux parents de l'école National, ils souhaitent voir construire une école provisoire sur le terrain des casernes. "S'ils ont été capables de construire la Busserade en trois mois, ils peuvent en faire une nouvelle pour la rentrée 2014", estime Fathia, une autre mère d'élève. En revanche, elle refuse l'idée que leur mouvement soit une simple contagion de celui enclenché la semaine précédente à National. "Nous avons fait une pétition il y a plusieurs mois déjà, rétorque-t-elle. De toute façon, le problème est connu depuis longtemps. Toutes les écoles du secteur sont saturées et, à chaque fois, ils nous ressortent la même histoire. A quoi ça sert qu'ils recensent nos enfants chaque année pour qu'on découvre à la rentrée qu'ils n'ont pas d'école ? Nous voulons du concret"
Affairé à faire entrer les élèves, un enseignant abonde dans son sens : "La poussée démographique a commencé en maternelle, il y a plusieurs années. Et, forcément, les élèves finissent par atterrir en primaire". Sur les quatre maternelles et les sept primaires, il a comptabilisé 14 élèves en plus, ce qui oblige l'inspecteur d'académie à ouvrir une classe supplémentaire. "Le quartier est en zone d'éducation prioritaire, détaille Florimond Guimard, du syndicat SNU IPP. Cela impose un maximum de 25 élèves par classe. Quand ce taux est dépassé, l'inspection d'académie décide l'ouverture de classes supplémentaires. Or, à Marseille, cette ouverture est impossible faute de locaux pour les accueillir".
Le syndicaliste a comptabilisé 25 écoles concernées dans l'ensemble de Marseille dont dix classes supplémentaires dans les écoles de la Belle-de-Mai. "On sait que ce quartier est l'un des plus pauvres de Marseille, de France, voire d'Europe. On y trouve un habitat très dégradé qui accueille les familles qui n'arrivent plus à se loger dans les arrondissements du centre-ville. Ces déplacements s'ajoutent à la démographie déjà forte dans le quartier. Mais tout cela est connu de tous. Ce n'est pas une découverte".
Contactée par nos soins, l'adjointe aux écoles, Danielle Casanova a une lecture plus brutale de cette situation sociale et de la difficulté de la Ville à suivre le mouvement :
Les urbanistes partent du principe qu'en France, on fait un 1,5 enfant par femme en moyenne. Dans ce quartier, ils en font plutôt 5 qu'1,5. Forcément, on a du mal à suivre.
Cette évaluation au doigt mouillé résiste mal face aux vérités statistiques. Ainsi en septembre dernier, à l'occasion d'une visite du ministre de l'éducation Vincent Peillon le site Provence Education citait des statistiques de l'Insee à l'appui des propos du directeur d'académie, Jean-Luc Bénéfice, toujours à propos de l'urgence à bâtir de nouvelles écoles. Or, selon les données de l'Insee pour l'année 2009, les familles ayant quatre enfants ou plus âgés de moins de 25 ans représentent 8,1% de l'ensemble des familles contre 3,7% sur l'ensemble de la ville. Si le nombre d'enfants par femme est sans doute plus élevé dans cet arrondissement qu'ailleurs, il est stable puisqu'il a progressé de moins d'un point depuis 1999. En revanche, les familles de la Belle de Mai sont 47,8% à avoir un ou deux enfants dans cette même catégorie d'âge contre 46% dans l'ensemble de la ville. 

"Ces élèves en trop auront disparu à la rentrée"

Quant à la surchauffe que connaît l'école Busserade, l'élue la minimise : "Les parents m'ont parlé d'un surplus de quatre élèves. Or, on sait qu'il y a beaucoup de déménagements en cours d'année dans ce quartier. Ces élèves en trop auront sans doute disparu à la rentrée de septembre quand nous ferons le point avec l'inspection d'académie pour ajuster la carte scolaire". En tout cas, il est hors de question d'envisager la construction d'une école provisoire dans un délai aussi court. "Les gens n'ont pas conscience des délais administratifs nécessaires. Certes, pour poser les modules il faut trois mois, mais il faut compter six à huit mois si on prend en compte l'ensemble des formalités"
En attendant la construction puis l'ouverture des écoles "provisoires" de la caserne Bugeaud pour la rentrée 2015, Danielle Casanova a une solution transitoire pour faire face à la surchauffe : "Nous recherchons des locaux disponibles dans les écoles du secteur notamment avenue de Strasbourg et à l'école Révolution près de Félix-Pyat où quatre classes sont d'ores et déjà disponibles". Une proposition qui fait bondir Florimond Guimard : "Encore une fois, on va forcer les familles à traverser le quartier pour amener leurs enfants à l'école, voire même séparer les fratries. Or, si on impose un taux maximum de 25 élèves par classe, c'est pour la réussite scolaire de ces enfants qui sont des Marseillais comme les autres".
Dernière carte de la Ville, la construction d'une nouvelle école à la Friche Belle de Mai en 2017 voire 2018. Mis à part, les 133 logements du programme en cours de construction sur le site de l'ancienne maternité du quartier, la future école sera située assez loin des zones très peuplées situées à proximité du boulevard National et des anciennes casernes. Les 25 000 mètres carrés des casernes du Muy font rêver les parents d'élèves du quartier : "Notre école a déjà été construite sur le site d'une ancienne caserne, note une maman. Pourquoi ne pas en faire plus ?"
Dans le volet culture de son programme électoral, Jean-Claude Gaudin y voyait plutôt un "pôle média 2.0" pour doubler le potentiel d'emplois de la Friche Belle de Mai. Ni élémentaire, ni maternelle, donc.

marsactu Par Benoît Gilles, le 13 mai 2014

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