mardi 14 mai 2013

IL EST POSSIBLE DE RÉGLER LE PROBLEME DES ROMS


le 10/05/2013
Malgré la mobilisation d’une multitude d’acteurs, la situation des Roms ne cesse de se dégrader. Interrogations en marge du premier « Social For’Roms » à Marseille.

« Vous savez ce qu’on dit de Manuel Valls ? Que, dans le gouvernement, Sarkozy a oublié un de ses ministres  », plaisante un écolo. Comme pour lui donner raison, le premier flic de France y est allé d’une saillie que ses prédécesseurs n’auraient pas reniée : « Les Roms ne souhaitent pas s’intégrer (ils) ont vocation à rester en Roumanie ou à y retourner. »
Des propos largement commentés lors du « Social For’Roms  », mi-mars à Marseille, et qui entrent en résonance avec la multiplication des démantèlements dans les Bouches-du-Rhône. Les représentants de l’État expliquent pourtant doctement que, dans le prolongement de la circulaire du 26 août 2012, le «  diagnostic collectif et individuel  » réalisé en ce moment dans les 32 camps recensés dans le « 13 », vise autant à l’« amélioration des conditions sanitaires  » qu’à « l’éradication des bidonvilles  ». Et de rappeler que pour s’inscrire «  dans un parcours d’insertion  », «  le premier critère, c’est de ne pas être un délinquant  »…
Les associations, après avoir demandé, sans succès, un «  moratoire des expulsions  », travaillent aujourd’hui avec la Dihal (Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement). Le malaise est palpable dans leurs rangs. D’autant que, comme le déplore Kader Attia, de l’Ampil 13 (1), «  quand on va sur le terrain, juste après nous, c’est la police qui débarque ». Et Christophe Lenfant, du Secours catholique, de s’interroger sur le travail de diagnostic : « A quoi va-t-il servir ? A trier, à sélectionner ?  »
En filigrane, cette interrogation : comment expliquer, malgré la pluralité des acteurs - institutionnels, associatifs... - intervenant auprès d’une population n’excédant pas dans les Bouches-du-Rhône 2000 personnes, que la situation de ces dernières ne cesse de se dégrader ? Certes, comme le rappelle Alain Fourest, de Rencontres tsiganes, «  au début, on n’était qu’une poignée. Cela ne fait que trois-quatre ans qu’il y a une multitude d’acteurs ».Ce qui, pour le vice-président (Front de gauche) à la Région, Jean-Marc Coppola, a permis à la fois « une médiatisation de la question et donc une mobilisation mais aussi une radicalisation des positions  ».
Aujourd'hui, explique Bernard Eynaud, de la Ligue des droits de l’Homme, «  il y a plusieurs types d’associations qui interviennent. Des associations caritatives, souvent d’obédience chrétienne, comme la Cimade. D'autres dont la porte d’entrée est plus « politique », comme le Mrap. Et des associations plus « professionnelles » interviennent avec un cahier des charges précis, sur la santé comme Médecins du monde ou sur le logement comme la fondation Abbé Pierre ou l’Ampil. A cela s’ajoutent les organisations syndicales et politiques. »
D’où parfois, sur le terrain, « des problèmes de coordination  ». Voire de «  stratégies  ». Pas simplement sur l’opportunité de réquisitionner - ou non - tel ou tel lieu. « Pour certains, cela ne sert à rien de travailler avec l’Etat, décrypte le militant. D’autres considèrent que, même si c’est un jeu de dupes, on ne peut pas jouer la politique de la chaise vide. Et enfin, il y a ceux, minoritaires, qui ont cru au changement.  »
Reste qu’en ce moment, avoue-t-il, «  on est en panne car on ne voit pas de solution. D’autant que, sur le terrain, les problématiques que l’on rencontre dépassent largement nos capacités et nos compétences ». Mais l’Etat, non content d’être schizophrène, a, lui aussi, ses limites. « Quand on voit les terrains qui appartiennent à l’Etat, à la Région, au département ou aux agglos, il y aurait des niches à exploiter, estime Dominique Michel, de l’Addap 13. Mais, à la veille des élections, on sait très bien que les municipalités ne bougeront pas.  »
Pourtant, rappelle Alain Fourest, «  on parle de 1500 personnes ! Qu’est-ce que c’est pour une ville comme Marseille ? Rien ! La question qui se pose, ce n’est pas celle des Roms, c’est celle de notre capacité à accueillir l’autre.  » Comme le dira un Rom, ce jour-là, à Marseille : « Cela fait sept siècles que l’on nous chasse ! Combien de temps allons-nous encore devoir courir ?  » Et Bernard Eynaud de conclure : «  A force d’être chassé, au bout d’un moment, on ne peut plus aller ailleurs, car ailleurs, il n’y en a plus.  » Plusieurs Roms ont d’ailleurs porté plainte contre les habitants qui les ont délogés de la cité des Créneaux...
Sébastien Boistel  (Le Ravi)

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